La vingtaine d’amies difficiles de Sébastien Leclerc
La vingtaine d’amis difficiles de Sébastien Leclerc
Région de Lyon, en France, 1473
— Tu pourrais peut-être aller vivre chez des amis, propose Philibert à son employé, Sébastien Leclerc, un adolescent de 14 ans.
— Vous savez que je suis orphelin et que des amis, je n’en ai pas.
— Ça me fait de la peine de devoir te undefined :, Sébastien. Mais, il faut que je pense à nourrir ma famille. Depuis deux ans, nos récoltes sont affreuses. C’est presque la disette :manque de vivres..
Sébastien ramasse son balluchon. Il ne peut pas vraiment en vouloir à son patron. L’adolescent se met en route.
— Bonne chance! lui lance Philibert avec regret en regardant s’éloigner le jeune homme qui a travaillé ardemment à ses côtés depuis trois ans.
Sébastien, rongé par l’incertitude, quitte le village pour la première fois. Où ira-t-il? Comment fera-t-il pour vivre? Il ne voit qu’une seule option, et elle lui inspire de la crainte.
Une rencontre aussi brusque que douce
Sébastien Leclerc, affamé et épuisé après avoir parcouru les longues lieues :ancienne mesure de distance qui équivaut à environ 4 km. poussiéreuses qui l’ont mené à Lyon, essaie de s’orienter dans la rue achalandée. Cette ville marchande, à la croisée des grandes routes commerciales de l’Europe du Nord et de l’Italie, grouille de monde. Sébastien n’a jamais vu autant de gens! La cacophonie urbaine assaille ses oreilles. L’adolescent se demande s’il a bien fait de quitter la campagne.
Un cheval arrive au trot. Sébastien s’écarte rapidement de sa route et évite de justesse de se faire écraser par l’animal. Son mouvement brusque le fait heurter une adolescente qui échappe les livres qu’elle tenait dans ses mains.
— Imbécile! gronde Bernard, le jeune bourgeois qui accompagne Catherine Buyer.
Sébastien se confond en excuses et s’empresse de ramasser les livres et de les remettre à la fille. Ses doigts frôlent les mains fines de Catherine qui lui sourit faiblement. Un élan de chaleur traverse le corps du paysan.
Le couple se remet en route. Envoûté, Sébastien le suit des yeux.
« Même si je n’oserais jamais approcher cette fille, se dit-il, rien ne m’empêche de la suivre. Je peux toujours l’admirer de loin. »
Sébastien contourne les passants sans arrêter d’épier :observer attentivement et secrètement une personne. Bernard et Catherine qui aboutissent à la rue Mercière, devant un bel édifice à deux étages.
— Tu viendras à mon dîner d’anniversaire dans une semaine? demande le jeune bourgeois.
— Avec plaisir, répond Catherine.
Bernard salue son amie et repart, tandis que Catherine entre dans l’édifice. Pendant quelques minutes, Sébastien observe les gens qui entrent et sortent du bâtiment. Il se met à espérer revoir la fille aux mains fines. Toutefois, le gargouillement de son estomac, vide depuis deux jours, le ramène à la réalité.
« Ce n’est pas dans ce quartier prospère que je trouverai un morceau de pain », raisonne le pauvre paysan.
Manger à l’église
L’adolescent erre dans les rues. Au marché, il regarde avec envie les étals :tables sur lesquelles sont exposées les marchandises dans les marchés publics. de fruits. Sans un sou, impossible de se rassasier.
Découragé, Sébastien quitte le marché pour se retrouver devant la cathédrale Saint-Jean, où un groupe de gueux :mendiante ou mendiant, personne qui vit dans la pauvreté. se tient sur le parvis. L’adolescent constate que, comme lui, ils sont en quête de nourriture. Il se met en ligne pour recevoir du pain que distribue un religieux en soutane. Lorsqu’il arrive son tour, il reçoit sa maigre pitance :nourriture. et se met à mâcher lentement son morceau de pain pour faire durer le plaisir.
L’adolescent constate que, comme lui, ils sont en quête de nourriture. Il se met en ligne pour recevoir du pain que distribue un religieux en soutane. Lorsqu’arrive son tour, il reçoit sa maigre pitance et se met à mâcher lentement son morceau de pain pour faire durer le plaisir.
Une heure plus tard, au soleil couchant, Sébastien voit des gens s’installer pour dormir sous un pont. Il se résigne à faire comme eux. Demain, il doit à tout prix améliorer son sort.
La merveille de la rue Mercière
Le lendemain matin, Sébastien Leclerc longe la rivière Saône et retourne à la rue Mercière dans l’espoir d’apercevoir Catherine. Les volets de la fenêtre de l’édifice sont ouverts. Curieux de voir ce que renferme l’intérieur de cette boutique, il s’en approche. Juste au moment où ses yeux discernent une machine avec une longue vis en fer, une main forte saisit son bras.
Sébastien cherche à se dégager de la prise d’un homme barbu dans la quarantaine.
— Mais, je le reconnais, lui! s’exclame une voix fluette :fragile, qui manque de force..
À l’intérieur, derrière le barbu, se tient Catherine.
— C’est lui qui m’a fait tomber les livres des mains hier, Papa, ajoute-t-elle.
— Tu épies ma fille? l’accuse Robert Buyer d’un ton sévère.
Sébastien cesse de se débattre.
— C’est vrai qu’hier j’ai suivi Mademoiselle, mais ce n’était point avec de mauvaises intentions, se défend-il en baissant les yeux. J’ai compris que l’édifice, ici, devait être un commerce. Intrigué, je suis revenu pour découvrir de quel genre de boutique il s’agit. Je viens d’arriver à Lyon et je cherche du travail.
Sébastien est soulagé lorsque M. Buyer libère son bras et lui fait signe d’entrer dans la boutique.
— Viens satisfaire ta curiosité.
L’invitation ne surprend guère Catherine, car son père prend toujours plaisir à montrer son travail.
Une fois à l’intérieur, Sébastien voit de plus près la machine qui avait capté son attention.
— Je suis imprimeur, et voici ma dernière production, explique M. Buyer qui saisit un livre sur une table et le remet au visiteur.
L’adolescent admire la couverture et tourne délicatement les pages couvertes de symboles indéchiffrables pour lui. Il referme soigneusement le livre et le remet sur la table.
— Avant cette invention, raconte M. Buyer, ce sont les moines :religieux chrétiens vivant à l'écart du monde.copistes :personnes qui copient des manuscrits. qui copiaient les textes à la main.
Sébastien hoche la tête. En fait, le seul livre qu’il a jamais vu, c’était une bible produite de cette manière.
— C’était une longue tâche ardue, précise Catherine.
— À présent, poursuit M. Buyer, la reproduction d’ouvrages en grand nombre est possible grâce à la presse à imprimer qu’a mise au point Johannes Gutenberg en 1450, en Allemagne.
— C’est près d’ici? demande Sébastien qui n’entend pas le soupir d’exaspération de Catherine en réaction à son ignorance.
M. Buyer se montre plus compréhensif.
— Ce n’est point à côté. Néanmoins, cette nouvelle technologie a voyagé jusqu’ici.
— Selon mon père, intervient l’adolescente, l’imprimerie est l’outil idéal pour diffuser les savoirs. Elle va donc changer le monde.
— Le plus étonnant, reprend l’imprimeur, c’est qu’en fait Gutenberg n’a rien inventé. Il n’a fait que combiner quatre techniques qui existaient déjà et les a améliorées : les caractères mobiles :pièces métalliques ayant le dessin en miroir d'une lettre ou d'un signe aux fins d'impression. qu’utilisaient les Romains, la presse utilisée pour écraser le raisin, les moules utilisés pour couler les caractères en orfèvrerie :art de fabriquer des objets en or. et les alliages au plomb créés dans l’artillerie :matériel de guerre.. C’est un génie!
Même s’il ne saisit pas tout, Sébastien cherche à comprendre le fonctionnement de cette machine. Il a déjà vu une presse à raisin et reconnaît la plaque mobile que l’on peut descendre et monter en faisant tourner la vis à l’aide du levier.
M. Buyer poursuit ses explications :
— Il nous faut d’abord des caractères mobiles de même la même taille, façonnés dans des moules avec un alliage de plomb résistant. Ensuite, à l’aide d’une plaque, on aligne les caractères en jouant sur les espaces entre les mots pour former un texte. Mais, il faut être attentif, car il faut tout placer à l’envers. Puis, on recouvre les caractères d’encre, on y place une feuille de papier et l’on presse le tout. Et voilà! la page est imprimée!
Tout en parlant, M. Buyer retire quelques lettres moulues d’une plaque de bois sous la presse. Il les tend à Sébastien qui les prend dans ses mains tremblantes de nervosité avant de les échapper.
— Excusez-moi! balbutie le paysan en se mettant à genoux pour ramasser les lettres.
— Ce n’est point grave, le rassure M. Buyer. Tu peux les replacer sur la plaque qu’on appelle une galée.
Sébastien Leclerc contemple les lettres dans sa main. Analphabète :qui ne sait ni lire ni écrire., il n’a aucune idée de l’ordre dans lequel replacer les caractères. Père et fille remarquent l’hésitation du jeune homme, qui dépose les lettres dans la galée.
— J’adorerais travailler ici, dit Sébastien.
Catherine s’avance et remet dans le bon ordre les lettres sur la galée.
— Tu rêves, mon ami, laisse-t-elle tomber. Tu viens de nous montrer que tu ne sais pas lire.
— Je pourrais apprendre, affirme Sébastien, les yeux remplis d’espoir.
L’imprimeur reste silencieux. Il voudrait bien aider ce jeune homme sympathique. Or, un apprenti analphabète ne lui serait pas très utile.
Apprivoiser une vingtaine d’amis
« Quel prix à payer pour assister à la fête de Bernard! » peste Catherine. Elle en veut à son père. Décidé à lui inculquer des notions citoyennes et de charité envers les autres, il l’oblige à enseigner l’alphabet à Sébastien Leclerc. Sinon, elle ne pourra pas assister à la soirée mondaine :relatif à la société des gens fortunés. organisée pour l’anniversaire de son ami. En plus, pour accomplir cette tâche, il ne lui accorde qu’une petite semaine.
Catherine entre dans la salle aux voûtes en pierre qui sert d’entrepôt à l’imprimerie. Son élève l’attend.
Sébastien appréhende cette première leçon. Pourra-t-il apprendre à distinguer les lettres de l’alphabet? Il le doit.
Catherine et lui s’installent à une petite table de bois. D’un coffret, la fille sort une lettre de plomb et la met devant son élève.
— Bon, dit-elle, commençons par la lettre « a ».
Sébastien Leclerc prend la lettre en métal, l’observe et la manipule. Il mémorise facilement la forme de ce premier caractère. Cependant, lorsque Catherine lui montre d’autres lettres, il peine à se souvenir des boules et des queues qui distinguent chaque caractère.
« À ce rythme, on n’y arrivera pas », se morfond Catherine.
Un bedon dans tous les sens
Sébastien Leclerc se couche sur une paillasse :enveloppe garnie de paille ou de feuilles sèches, qui sert de matelas. installée dans un coin de l’imprimerie. Il est reconnaissant de pouvoir y dormir et de recevoir de l’eau et de la nourriture en échange de menus :petits. travaux.
Après trois jours de leçons, ses efforts portent fruits. Même si certaines lettres lui donnent du fil à retordre, il peut maintenant reconnaître les quatorze premières lettres de l’alphabet. Il s’est inventé des trucs pour s’en souvenir. La lettre « b », la boule est devant comme un bedon, le « d », la boule est derrière.
*****
— Déjà notre dernière leçon, énonce Catherine en s’installant à la table. Encouragée par les progrès de son élève, elle souhaite vivement que Sébastien réussisse l’épreuve du lendemain.
— Il y a une semaine, je ne croyais pas que tu y arriverais, mais, à présent, je suis convaincue du contraire.
— Et si j’échoue?
— Mon père peut être, euh, intransigeant. Tu devras poursuivre ta route. Mais, tu n’as rien à craindre, tu y arriveras.
« Si seulement je pouvais être aussi confiant qu’elle », songe Sébastien.
****
Le lendemain matin, Sébastien se présente devant l’imprimeur. L’épreuve commence. Pour devenir apprenti, il devra reconnaître les 10 lettres que va lui montrer M. Buyer.
Sébastien Leclerc reconnaît sans difficulté les neuf premiers caractères.
— Et celle-ci? lui demande l’imprimeur en lui tendant la dixième et dernière lettre.
Sébastien Leclerc hésite. Il est si près du but. « C’est un p », se dit-il. La seconde après, le doute s’installe dans son esprit. Il retourne le caractère dans sa main. « Ça pourrait aussi être un b? » Il ne sait plus.
— Un « b », énonce-t-il enfin.
— Je regrette, mais c’est un « p », prononce M. Buyer.
Sébastien Leclerc grince des dents. L’ancien paysan aurait tant aimé devenir apprenti imprimeur. Une semaine ne lui a pas suffi pour apprivoiser les lettres de l’alphabet et en faire ses amies.
— Je vais chercher mon balluchon, marmonne Sébastien.
M. Buyer met une main sur son épaule.
— Il va bientôt faire noir. Tu peux passer une dernière nuit à l’atelier. Demain matin, on te donnera un bon repas avant ton départ.
« Au moins, je ne partirai pas l’estomac vide », se console l’adolescent.
Un sommeil léger aux conséquences inattendues
Les machines se sont tues, les ouvriers ont quitté l’imprimerie. Sébastien Leclerc profite des dernières lueurs du jour pour faire le tour de l’atelier. Il ramasse un livre et se concentre pour déchiffrer le titre du volume.
« La première lettre, c’est un L, la deuxième, un a. Ça forme le mot La. Les prochains mots sont v-i-e et d-u. »
Sébastien bute sur le prochain mot. Il reconnaît le « c » et le « h », mais ne sait pas comment prononcer cette combinaison de lettres.
« Un jour, je saurai lire », se promet-il en replaçant le livre.
La cloche du beffroi :tour qui abrite une cloche. de la ville sonne l’heure du couvre-feu quotidien. Comme tous les habitants de Lyon, Sébastien Leclerc place alors une sorte de cloche en céramique sur les flammes du foyer. Les braises seront ainsi conservées pour rallumer le feu au matin sans risquer que le feu se propage pendant la nuit.
Plongé dans le noir, Sébastien se laisse tomber sur sa paillasse. L’incertitude qui l’attend le lendemain le tourmente et l’empêche de dormir.
Un coup de tonnerre le fait sursauter. La pluie diluvienne frappe les volets, et le vent hurle.
« Je suis content d’être à l’abri, se dit Sébastien Leclerc en se soulevant sur ses coudes. Demain, je ne serai pas si chanceux. »
Soudain, une rafale violente ouvre les volets. Un éclair blanc, la foudre, s’abat sur l’édifice. La puissante décharge électrique touche une pile de livres, produisant des étincelles qui embrasent le papier. Sébastien, craignant ne pas venir à bout de l’incendie, se précipite dans la rue et se met à crier.
« AU FEU! AU FEU! »
Il retourne dans l’imprimerie et prend la couverture sur sa paillasse pour essayer d’étouffer les flammes qui se répandent à vive allure. La fumée noire et épaisse le fait tousser. Étourdi par la chaleur et la fumée, il perd conscience. Son corps s’effondre sur le sol.
Quelques minutes plus tard, des voisins accourent dans le bâtiment avec des seaux d’eau. À leur grande surprise, ils ne trouvent que des livres réduits en cendres. Cependant, juste à côté, gît le corps inerte de Sébastien.
La malchance qui donne une nouvelle chance
En ouvrant les yeux, Sébastien Leclerc est surpris de voir Catherine, son père et les voisins qui l’entourent. Il essaie de parler malgré sa voix rauque d’avoir inhalé :absorbé par les voies respiratoires. trop de fumée.
— Je n’ai pas réussi à sauver les livres.
— L’essentiel, c’est que tu as survécu aux flammes, le console Catherine. Les livres, on peut toujours les réimprimer.
— Sans toi, mon commerce et les bâtiments adjacents y passaient, le félicite M. Buyer.
— Il faudra s’occuper de ta brûlure au bras, s’inquiète Catherine.
Sébastien se rend alors compte de la douleur de son bras gauche qui l’élance, entouré d’une chemise déchirée.
— Tu peux te loger dans une petite chambre chez moi, offre une voisine, une dame d’âge mûr qui, comme les autres gens du quartier, est reconnaissante envers Sébastien Leclerc. Sans son action rapide, de nombreux édifices auraient été perdus.
— Puis, moi, déclare M. Buyer, je te propose de devenir mon apprenti si ça t’intéresse toujours.
Sébastien tousse et sourit ensuite de toutes ces dents.
— Cependant, ajoute l’imprimeur, c’est à une condition…
Les amis de Sébastien Leclerc sauveront des vies
Lyon, 1475
Sébastien Leclerc s’est habitué au brouhaha de la ville. Cependant, à l’occasion, l’ancien paysan recherche la tranquillité et se réfugie, comme en ce dimanche après-midi, dans le théâtre antique de Fourvière, sur une hauteur qui domine la ville de Lyon.
Sa main frotte la cicatrice de son bras gauche qui lui rappelle le soir qui a changé sa vie voilà deux ans.
Sébastien a travaillé pendant un an chez M. Buyer jusqu’à ce que celui-ci déménage à Paris avec sa famille. Heureusement, par la suite, il a pu décrocher un emploi de presseur chez un autre imprimeur. Manipuler la presse et prendre part à la production de livres le passionne.
La veille de son départ, M. Buyer lui a rappelé leur entente.
— Lorsque je t’ai pris sous mon aile, c’était à une condition. Même si je pars, je tiens à ce que tu respectes notre entente.
L’apprenti a tenu sa promesse. Il a appris à lire en y consacrant de longues heures en compagnie de sa vingtaine de nouveaux amis. Même s’il ne peut toujours pas déchiffrer les textes écrits en latin, il est de plus en plus habile à lire ceux en français.
Assis dans les vieux gradins, bâtis en blocs de gneiss :roche composée de feldspath, de quartz et de mica. et de granite par les Romains, il examine le dernier livre qu’il a aidé à imprimer : un traité médical. Sébastien a souvent contribué à rendre accessibles des textes religieux ou des récits d’aventures. Or, l’ouvrage qu’il tient dans les mains est exceptionnel : le choix du papier, le texte disposé sur deux colonnes et la clarté des lettres.
Le soleil descend rapidement. Fermant délicatement le livre, Sébastien se met en route pour rentrer chez lui. Soudain, un homme à la course l’accroche au passage. Surpris, Sébastien laisse tomber son livre. Aussitôt, l’homme qui l’a heurté se penche et ramasse l’ouvrage.
— C’est bien toi, Sébastien Leclerc! s’exclame-t-il.
Sébastien reconnaît Bernard, qui examine le livre avec intérêt.
— Je n’aurais jamais pensé te voir le nez dans un bouquin, surtout pas un si savant.
Les deux jeunes hommes discutent un peu. Sébastien apprend que Bernard étudie la médecine. Il ne peut retenir la question qui lui brûle les lèvres.
— Et la belle Catherine, tu as fini par l’épouser?
— Hélas, non! Elle a préféré le charme d’un aristocrate. J’ai appris qu’elle a ouvert une école où elle enseigne à des jeunes moins fortunés.
Tout en parlant, Bernard consulte la table des matières du livre.
Sébastien rayonne de fierté. Ce traité médical, le fruit de son travail, aidera à répandre des connaissances vitales. « Ce livre servirait mieux à un homme de médecine qu’à un presseur comme moi », raisonne-t-il.
— Je te l’offre, Bernard.
Ravi, le médecin en devenir reconnaît que, lors de leur première rencontre, son jugement sur Sébastien était erroné.
Sébastien laisse Bernard le cœur léger, porté par un constat heureux : « L’imprimerie va sans doute sauver bien des vies. »
FIN
Daniel Marchildon écrit pour les petits et les grands depuis plus de 30 ans. Il a signé 11 romans jeunesse et 5 destinés aux adultes. L’auteur habite à Lafontaine, près de la baie Georgienne, à 160 km au nord de Toronto. Il a déjà fait une courte visite à Lyon.
Il croit que la technologie continuera d’être au service de l’humanité… si les êtres humains se servent d’elle plutôt que de dépendre d’elle.
Son prochain livre, Le tribunal : le cas de Nico, un roman pour ados coécrit avec Micheline Marchand, doit paraître au printemps 2024 dans la collection 14/18 aux Éditions David. Consultez sa page Web.
L’artiste Vic Putinski se passionne pour le 2D, travaillant à la fois dans l’industrie de l’animation (notamment pour la série Hilda de Netflix) et de façon indépendante. Ses sujets de prédilection sont les dessins animés, les plantes, les oiseaux et la nourriture. Pour en savoir plus à son sujet, consulte son portfolio.
Glossaire
remercier pour ses services : congédier ou renvoyer une employée ou un employé.
disette : manque de vivres.
lieues : ancienne mesure de distance qui équivaut à environ 4 km.
cacophonie : mélange de sons répétitifs désagréables.
épier : observer attentivement et secrètement une personne.
étals : tables sur lesquelles sont exposées les marchandises dans les marchés publics.
gueux : mendiante ou mendiant, personne qui vit dans la pauvreté.
pitance : nourriture.
fluette : fragile, qui manque de force.
moines : religieux chrétiens vivant à l'écart du monde.
copistes : personnes qui copient des manuscrits.
caractères mobiles : pièces métalliques ayant le dessin en miroir d'une lettre ou d'un signe aux fins d'impression.
orfèvrerie : art de fabriquer des objets en or.
artillerie : matériel de guerre.
Analphabète : qui ne sait ni lire ni écrire.
mondaine : relatif à la société des gens fortunés.
paillasse : enveloppe garnie de paille ou de feuilles sèches, qui sert de matelas.
menus : petits.
beffroi : tour qui abrite une cloche.
inhalé : absorbé par les voies respiratoires.
gneiss : roche composée de feldspath, de quartz et de mica.